Kolkoz, Films de vacances, Installation Galerie Emmanuel Perrotion, 2006
Le collectif Kolkoz (Samuel Boutruche et Benjamin Moreau) propose le dédoublement d’une réalité, le film de leurs souvenirs de vacances dont ils n’ont conservé que la bande son, insignifiante. Les artistes remodélisent personnages et paysages en images de synthèse, qu’ils calent sur la bande son, transcendant ainsi la banalité du quotidien en une « hyper banalité ». Une installation accompagne parfois leurs vidéos d’art, composée de mobilier, simplifié dans ses formes, mais évoquant le foyer familial avec son organe central : le téléviseur. Les deux artistes trafiquent l’apparence de la réalité mais n’en modifient pas la linéarité. Seule une fiction (Schaeffer), créée de toute pièce par un auteur, permettrait la montée en intensité d’un événement. Mais ici, rien ne se passe.
Ces artistes français ont d’abord exposé au Palais de Tokyo en janvier 2006 avant d’être séduits par la galerie Perrotin, la même année, pour une exposition intitulée La matière du mensonge. Le collectif s’attaque à un type particulier du jeu vidéo, le Sim ainsi qu’aux jeux sans règles, reposant sur l’engendrement procédural du jeu à l’infini qui connaît depuis 2009 un véritable succès commercial avec Minecraft (Markus Persson 2009). Will Wrigt est l’inventeur de la planète « SIM » qui a donné au joueur la responsabilité de la création d’une ville « Sim City » ou encore d’êtres humains « The Sims ». Un détail important oppose toutefois les sims à l’œuvre de Kolkoz : l’avatar. Dans les sims, l’avatar reste sous le contrôle du joueur alors que les personnages de Kolkoz échappent à celui du visiteur. Celui-ci se retrouve face à un spectacle traditionnel, sans interactivité, ce qui le rend encore plus passif en face d’un écran sur lequel rien n’advient sinon la performance des artistes eux-mêmes qui ont renumérisé le film de leurs vacances. C’est en cela que l’œuvre de Kolkoz trouve véritablement sa dimension artistique, en plongeant leurs contemporains dans un univers qui leur est familier mais où un léger décalage les fait basculer vers la critique.